Hervé Magnin est un artiste singulier et pluriel. Cinéaste, comédien, musicien, écrivain, plasticien… il a quelques cordes à son arc. Les flèches qui en sortent sont semblables à celles d’Éros et Cupidon. Les thèmes qui l’inspirent tournent tous plus ou moins autour de la résilience. Aventurier, il a certes parcouru le monde et vu du pays. Mais il est surtout curieux des âmes. Pas avare d’introspection, il s’aventure dans la sienne, mais aussi dans celles de ses semblables et aussi de ses dissemblables. Après une longue carrière de psychothérapeute, son intérêt pour la résilience individuelle, mêlé à ses aspirations sociétales, l’a poussé vers la psychologie politique et donc vers la résilience collective. Justice sociale et environnementale, partage raisonné et équitable des ressources, toutes ces valeurs, ses œuvres se mettent à leur service.
J’embrasse ma langue
Très souvent il se cache et je fouille tout recoin
Je le traque sans relâche et je le trouve enfin
Plus il se fait attendre et plus je tarde à jouir
Ce coquin n’est pas tendre quand il fuit mon plaisir
Est-il plutôt charnel ou plutôt platonique ?
Quelquefois spirituel et souvent alchimique
Quand enfin il surgit de la boite de Pandore
Qu’il paraît par magie, qu’il brille de tout son or
Tout mon être pétille, j’ai l’âme en expansion
Puis il me déshabille, prêt pour la création
Dans un accord parfait, me libère de mes maux
Me met à nu, je fais l’amour avec le mot
Le mot juste, le bon mot, celui que j’attendais
Le mot juste, le bon mot, celui qui m’attendait
En suis-je le créateur ? A moins qu’il soit mon maître ?
Je prétends être auteur, ou mon égo peut-être
Mais quand il coule en moi, que rien ne fait obstacle
Je doute que ce soit moi l’auteur de ce spectacle
Lui et moi au service de l’acte créateur
Jouant ensemble, complices, témoins et serviteurs
Il m’adresse une lettre et puis une autre suit
Bientôt va apparaître une syllabe et puis
De lettre en lettre, amour épistolaire
Quand j’ouvre la fenêtre, le mot s’envoie en l’air
En bon érotomane, il m’arrive de penser
A cet amour profane et je me sens aimé
A la Saint-Valentin, je ne sais pas s’il m’aime
Moi je l’aime, c’est certain, il parcourt ce poème
Quand nous jouons ensemble, je vibre sous ma gangue
Quand nous jouissons ensemble, alors j’embrasse ma langue
Ce baiser imparfait se joue de tous mes maux
Avec délice, je fais l’amour avec le mot
Le Bourget-du-Lac, le 17 avril 2025